Créer son entreprise d’impression 3D

L’impression 3D c’est fun, c’est hype, c’est cool. Alors pourquoi ne pas imaginer créer son activité et ainsi gagner sa vie?

Je vais provisoirement reprendre ma peau de conseiller d’entreprise et tenter de distiller un peu de bon sens aux naïfs mais néanmoins courageux futurs entrepreneurs.

Les « conseillers d’entreprise » se divisent en deux bataillons d’escrocs. Le premier, le plus important, qui représente environ 80% de l’ensemble, déblatère, brasse et vend fort cher un vent malodorant. On écoute deux heures, on lit un gros pavé pour au final constater qu’il n’y a rien à retenir malgré la tête farcie aux blabla. Le deuxième bataillon, dont je fais partie, est celui des fainéants, qui vend, fort cher, du condensé utile mais si concis que le client se demande s’il en a vraiment eu pour son argent.

1- un prévisionnel

2- un carnet d’adresse ou de solides compétences commerciales

3- du pognon, beaucoup de pognon.

Voilà, c’est tout ce qu’il faut connaitre. C’est 450€. Merci.

– » Hé m’sieur Yoan, faut développer, vous ne pouvez pas me laisser comme ça! »

Mais pourquoi? Tout y est. Vous écrivez un prévisionnel afin d’établir la viabilité du projet et de calculer vos besoins en pognon. Vous vous faites accompagner de quelques futurs clients qui vous font confiance grâce à votre bonne bouille, votre provisionnel et le grisbi que vous leur fichez sous le nez.

Merci qui? Merci 3DPrint4Ever.fr!

Que dites vous? Comment établir un prévisionnel? Il existe des milliers de bouquins et de sites internet qui décrivent des méthodes pour y parvenir. Hélas, les auteurs font généralement partie du premier bataillon, celui qui édite pour éditer, quitte à écrire en alexandrins. « Nous partîmes cinq cents ; mais par un prompt renfort. Nous nous vîmes trois mille en arrivant au port… » Et hop, 500 pages.

Le secret c’est votre cerveau, du bon sens et surtout ne pas se cacher la vérité; l’activité est « fun » mais nous fera-t-elle vivre?

Pour déterminer la viabilité d’un projet on commence par établir un prévisionnel en ne prenant en compte que les hypothèses les plus favorables. Puis on ajuste nos données jusqu’à ce que l’on arrive aux hypothèses les plus pessimistes. Si le projet reste viable alors il ne faut pas hésiter et se lancer.

Étudions le projet de Kevin, 18 ans qui vient de décrocher son DUT génie mécanique, passionné par l’impression 3D et dont la Prusa i3 est réglée aux petits oignons.

Son projet est de vendre des objets imprimés en 3D. Il vise les particuliers, les architectes, les industriels (prototypage) et compte, du moins au début, utiliser sa Prusa et travailler chez lui, sous le statut d’auto-entrepreneur.

Vous vous reconnaissez dans cette esquisse de portrait? C’est normal, vous êtes des dizaines de milliers à avoir eu la même idée. Bande de trous du cul.

Prenez un stylo, un bout de papier, couchez trois chiffres et redescendez sur terre.

Hypothèses saugrenues favorables:

1 -L’imprimante tourne 6 heures par jour, en production, sans ratage et a besoin d’une maintenance et d’un temps de préparation minimum entre chaque objet imprimé.

2 -toute votre production est achetée

3- vous arrivez à facturer le fonctionnement de votre Prusa, 6€ de l’heure (pas de TVA, vous êtes AE)

Pas besoin d’aller plus loin pour démontrer que votre projet est absurde:

6 x 6 x 22 = 792 euros de chiffre d’affaire par mois

Même pas besoin de retrancher les charges sociales, le coût des consommables, l’électricité, les taxes (CFE), etc. pour comprendre que l’affaire n’est pas viable.

En outre, vous subissez la concurrence de tous les particuliers qui sont équipés et pour la plupart avec du matériel plus performant. Entreriez-vous en concurrence avec un imprimeur 2D, vous qui possédez une imprimante à jet d’encre?

Vous devez raisonner comme un imprimeur 2D: qui donc acceptera d’acheter ma production, à partir de quelle qualité et de quel prix? Tout en considérant que si le marché de l’impression 3D n’a pas encore atteint la maturité de l’impression 2D, l’équilibre arrive à grands pas.

Par conséquent, vous devez taper dans du matériel professionnel qui offre, en outre, une fonctionnalité que n’ont pas vos concurrents (couleurs, précision, vitesse, matériaux, etc.)

Ensuite vous calculez une rentabilité horaire sans omettre l’amortissement des machines, leur entretien, votre communication et démarches commerciales, vos assurances, la location de vos locaux, les taxes, vos revenus et charges associés, du consommable (téléphone/internet inclu).

Compte-de-resultat-previsionnel

Muni de ces éléments, vous établissez la quantité de pognon nécessaire pour le démarrage et votre besoin en fond de roulement en prévoyant une croissance raisonnable.

La suite dépendra de vos talents de commercial. Il faudra tisser un lien avec un prospect sérieux, solvable et reconnu qui pourra se porter garant de votre compétence et du sérieux de votre projet.

Vous avez décroché un parrain et futur client? Vous avez les clés pour un tour de table auprès d’investisseurs prêts à risquer gros dans l’aventure.

Les banques? Wouahahahaha! Oubliez. ça sera déjà bien si l’une d’elle vous offre la possibilité d’ouvrir un compte professionnel.

Merci qui? Merci 3Dprint4Ever.fr!